Accueil Centenaire 1914-1918 Le Journal quotidien de Paul Legendre (1914-1915) Octobre 1914 20 octobre 1914
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20 octobre 1914
20 octobre
Je reçois une lettre de Monseigneur Bolo.
« 14 octobre 14
Bien cher ami
Il faudrait un volume pour décrire tout ce qui fait maintenant le charme de mes jours et… l’émotion de mes nuits : paysages, aventures, milieu social, ministère… J’y renonce. Tout ça c’est des souvenirs pour la Chaise [Saint-Georges-sur-Cher].
Pour le moment, faites-moi envoyer et envoyez-moi
1° le plus possible de journaux lus… C’est la manne et la rosée pour les matelots perdus à la surface de la mer immense…
2° Articles pour fumeurs, pipes, blagues, briquets à mèche…
Voyez le bon M. Germain et associez-le à vos efforts. Soyez, à vous deux, l’Olympe qui reçoit ma supplique. Je revis l’Odyssée.
Mon adresse (naturellement[1]) a changé. Je suis à bord du Waldeck-Rousseau par Toulon (Var). J’ai, pour le moment, beaucoup à faire…
J’espère que de longues causeries me dédommageront de la brièveté actuelle de mes lettres.
Bien affectueusement
H.B. »
Marine de guerre.- Le « Waldeck-Rousseau », croiseur cuirassé de 1ère classe.- 6 Fi 306/19. AD41
Je passe, alors, ma journée à chercher des journaux illustrés et publications diverses, cela me procure l’occasion de mettre au feu – en un immense feu de jardin – des vieux souvenirs du passé : cahiers de collège, livres, vieux journaux, etc.
J’apprends une suite de tristes nouvelles concernant le Blésois : le fils Pamolle, marchand de chaussures rue Porte-Chartraine est tué à l’ennemi ; le fils Beaulieu, boulanger rue Denis-Papin également tué à l’ennemi ; l’adjudant Cartier, tué à l’ennemi ; le capitaine Albert Moreau, tué à l’ennemi ; le fils de M. Pardessus, ancien pharmacien : Georges [Maurice] Pardessus, tué à l’ennemi dans les tranchées (il était le porte-drapeau de la Société de gymnastique « l’Abeille des Aydes »).
Blois.- L’Abeilles des Aydes. Soleil à la barre fixe.- 6 Fi 18/1731. AD41
J’apprends aussi que mon client : M. Harrault, demeurant rue des Ponts-Chartrains à Blois a été grièvement blessé ; je vais voir madame Harrault, la chose est malheureusement exacte. M. Harrault a été blessé aux jambes, aux bras et à la tête, aux environs de Noyon ; il a été transporté mourant à l’ambulance anglaise installée dans le château de Laversine, appartenant au baron de Rothschild (par Creil, Oise). Aussitôt arrivé à l’ambulance l’amputation du bras gauche lui a été faite, au dessus du coude.
Je lui écris pour lui donner des consolations et du réconfort ; j’écris aussi aux braves soldats Martineau et Courtioux. Cela leur fera plaisir.
[1] Pourquoi naturellement ? Je ne comprends pas le « naturellement » de Mgr.
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