• 11 janvier 1915

    11 janvier

    Une belle carte de Paul Verdier, représentant la Savoie pittoresque (Albertville et la forêt de Rhonne), datée de Chambéry et mise à la poste à la gare de Culoz

    « Jeudi 7 Janvier 1915

    Chambéry. Souvenir amical des Alpes, de la Savoie, sous la neige.

    Bonnes amitiés. Signé : P. Verdier »

    Ce brave Paul va dans tous les coins de la France. Voici une bonne lettre de M. Henri Robert de Lunéville.

    « Lunéville le 4 Janvier 1915

    Mon cher confrère

    Mon cher ami

    Votre lettre m’est parvenue, il y a deux jours, quelle joie toujours pour moi de la lire et de ressentir l’amitié si bonne, si sincère et si affectueuse que je suis toujours sûr d’y trouver ! Merci encore, plus que jamais, mon cher ami, car dans ces terribles moments, plus que jamais nous avons besoin de réconfort et de soutien. Et serait-il possible d’en avoir de meilleurs que votre sympathie ! Mais que de peine j’ai eue, mon cher ami, d’apprendre l’accident dont vous avez été victime, et dont, grâce à la volonté de Dieu, vous ne vous ressentirez bientôt plus, j’espère. Mais, sur le moment quel ébranlement vous avez dû ressentir et comme, en de pareils moments, toute la vie passée, et celle qu’on croyait encore avoir devant soi doit vous apparaître dans une minute terrible d’angoisse ! Vous serez bien aimable une fois de plus en ne me faisant pas trop attendre de vos nouvelles, car j’ai hâte de savoir comment vous vous trouvez ; vous pensez si je souhaite rapide votre guérison absolument complète ! Oui, votre notre cher Paul blessé, lui aussi, mais combien nous devons remercier Dieu de l’avoir si peu éprouvé, dans une mêlée aussi terrible, quelles que soient les conséquences qui en résultent elles ne seront que peu de choses auprès de la mort qu’il a vu de si prés ! Vous vous promettez de lui rendre visite, combien je vous en remercie. Quelle joie, quel réconfort ce sera pour lui, de pouvoir se jeter dans vos bras ! Vous pensez si je serais heureux de pouvoir, moi aussi aller près de lui ! Mais Mme Robert et mes filles sont de retour près de moi, et nous vivons des jours encore si anxieux que je ne puis, vraiment, les abandonner. Songez que les Allemands sont à 13 kilomètres de chez nous ! Chaque jour le canon fait rage, sans trêve, zeppelins et aéroplanes nous rendent des visites auxquelles on s’habitue, mais dont le danger n’en est pas moins grand. Combien je voudrais sentir celles qui me sont si chères, plus en sûreté !

     

    aviatik

    Aviatik [avion allemand] capturé par des soldats français.- Agence photographique Rol.- BNF, département Estampes et photographie, [Rol, 45448]

     

    J’ai été très touché de l’envoi[1] que vous avez bien voulu me faire, vous le trouvez modeste, mais ne donne-t-on pas toujours, et vous le premier, j’en suis sûr ; j’ai cru ne pouvoir mieux faire que de les donner à utiliser par notre chère conférence[2], soyez certain qu’ils seront bien placés. Merci pour ceux qui ressentiront vos bienfaits ! Veuillez, mon bien cher ami, accepter pour 1915 mes vœux les plus sincères, qu’elle vous apporte, à vous et à ceux qui vous sont si chers, bonheur et santé, et aussi, à notre chère patrie la paix glorieuse qu’elle a si bien méritée par le sacrifice de ses enfants. Au revoir, mon cher ami, veuillez être auprès de madame votre mère l’interprète de mes sentiments très respectueux et croyez-moi – toujours – votre fidèle et dévoué. Signé : Henri Robert. »

    À cette affectueuse lettre de mon bon et excellent ami de Lunéville était jointe la carte ci-dessous de madame Robert à ma mère :

    « Lunéville 3 Janvier.

    Bien chère madame

    Permettez-moi de venir vous exprimer mes affectueux compliments, malgré que je n’aie pas le plaisir de vous connaître, et vous demander d’offrir à monsieur votre fils toute ma sympathie, le remerciant de toutes ses gentillesses pour mon fils Paul. Les bons amis sont rares et plus appréciés pendant ces terribles moments que nous traversons.

    Que Dieu vous conserve à l’affection de votre digne fils c’est le souhait que je forme pour vous, et vous prie de recevoir tous deux ma bien sincère amitié. Signé : H. Robert. »

    Les lettres comme celles-là font plaisir et émanent du cœur de vrais amis.

    En réponse à mon petit mot de félicitations l’excellent M. Riffault m’écrit aujourd’hui :

    « 4, rue du Pot-de-fer

    Orléans

    Cher monsieur

    Ma femme et moi, nous sommes très sensibles à vos félicitations au sujet du capitaine Riffault que nous espérons bientôt voir venir en convalescence à Orléans. Ce pauvre blessé du 22 Août ne peut encore marcher qu’avec deux cannes, et est au grand regret de ne pouvoir retourner de suite au front gagner son 4e galon.

    Merci – cher monsieur – et bien cordialement à vous. Signé : E. Riffault. »

    Ce matin, je vais aux obsèques à Saint-Nicolas, de madame Eugène Lacaille, décédée à son domicile, quai du Foix, 31, dans sa 78e année.

    [1] J’avais envoyé à mon ami une modeste offrande pour les pauvres de Lunéville

    [2] La conférence de Saint-Vincent-de-Paul de Lunéville