En 2021, les Archives départementales ont fait l’acquisition auprès d’une librairie parisienne de quatre dessins originaux représentant des scènes de chasse à courre, localisées en Sologne par le vendeur. Ces dessins, réalisés à la mine de plomb, sont tous signés du monogramme « AD ».

Ces dessins sont de petites dimensions, tout au plus le format d’une carte postale. Chacun représente une scène de chasse à courre, à différents moments de la journée et avec différents équipages.

L’auteur a attribué à chacun un titre : « Sous l’averse », « Le récit du combat », « Amazones modernes » ou encore « Rentrée des égarés, soleil couchant ». La finesse et la précision du trait retranscrivent parfaitement l’intensité insufflée par l’artiste à ses créations. Un subtil repentir au niveau des traits de l’un des chevaux, sur le dessin « Amazones modernes », apporte encore plus de profondeur et d’authenticité à celui-ci. 

Dans « La rentrée des égarés », le cavalier de l’équipage est un valet de chiens portant la trompe de chasse qui symbolise à elle seule la dimension musicale donnée à la vénerie dès le XVIIIe siècle. Tout à la fois instrument de musique et unique moyen de communiquer pour le veneur, elle permet d’apporter des précisions au reste de l'équipage au cours du déroulé de la chasse. C’est précisément au veneur que revient le rôle d’indiquer aux autres membres de l’équipage les différentes phases de la chasse dont il est témoin. Ainsi « le « lancer » annonce que les chiens ont trouvé la voie (l’odeur) d’un animal ; la « vue » sert à prévenir que l’animal de chasse est vu ; le « bien-aller » indique que les chiens chassent bien leur animal d'attaque et les encourage (définition site : venerie.org).

Avec le dessin « Sous l’averse », c’est encore un valet de chiens à cheval qu’esquisse « AD » tandis que « Le récit du combat » et « Amazones modernes » donnent à voir la participation des femmes aux chasses à courre.

Au regard de la précision de ces scènes de chasse, il y a fort à parier qu’« AD » suivait directement les équipages et qu’il a sans doute lui-même participé à ces journées cynégétiques en Sologne.

De cet auteur, nous ne disposions d’aucune information lors de l’acquisition des quatre dessins. L’attention de l’archiviste s’est alors portée sur le support des œuvres, relevant que certaines étaient réalisées au verso de faire-part : indice au demeurant fragmentaire… C’est le cas de « Amazones modernes » esquissé sur un carton annonçant une noce prévue le 19 novembre 1929 en l’église de Channay-sur-Lathan (Indre-et-Loire).

« Rentrée des égarés » se révèle plus intéressant pour notre recherche. Il a quant à lui été dessiné sur une moitié du faire-part de mariage de Marguerite Malassiné avec Jean René Sarazanas, alors greffier en chef du tribunal de commerce de Brive. Bien que la date soit manquante, la mention de « La Corbillière » à Mer relie ce dessin au département de Loir-et-Cher et à des scènes croquées probablement dans une forêt voisine de Sologne. Au vu de la typographie de ce faire-part, similaire à celle de 1929, s’est formée l’hypothèse que ce mariage s’était déroulé durant la même décennie 1920. Les tables décennales de la commune de Mer sont alors venues le confirmer : ce mariage a eu lieu le 5 mai 1924 (cote : 5 E 136/18). À fortiori, la datation de ces dessins est postérieure à 1924. « AD », résidant peut-être à Mer, n’a pas esquissé ces dessins lors d’une seule partie de chasse mais sans doute sur plusieurs années.

Pour deux des dessins, la mention « fixé » est visible en bas à gauche sous les titres, signifiant qu’un fixatif a été déposé afin de contribuer à leur stabilité dans le temps. Preuve supplémentaire que leur auteur maîtrisait bien un certain degré de technicité dans son travail de dessin.

Alors si vous disposez d’informations permettant d’identifier notre mystérieux « AD », ou mieux encore si celui-ci compte parmi vos ancêtres, venez nous en faire part : les Archives départementales seraient heureuses de « chasser » leurs derniers doutes à son sujet !

Pour aller plus loin (liste non exhaustive)

- Adolphe de la Neuville, La chasse au chien d’arrêt, Blois, typographie Giraud, 1860, 224 p. (cote : GL 323) 

- M. de la Corbière, Fête de Saint Hubert, 1860, 20 p. (cote : BROCH 2362) 

- Règlement de la Société de chasse de Russy. Bail 1889-1899, Blois, imprimerie E. Moreau et Cie, 1890, 8 p. (cote : BROCH 2883) 

- Comte Henri de Vibraye, La chasse à courre. Guide de l’invité. Illustrations de Karl Reille, s.l., La Bonne Compagnie, 1951, 145 p. et 8 planches en couleurs (cote : GL 369) 

- Ministère de l’agriculture. Direction générale des Eaux-et-Forêts. Conservation d’Orléans, Règlementation de la chasse et de la louveterie, 1957, 225 p. (cote : CR 1296) 

- P. Gillardot, « La chasse en Sologne. Influence sur l’économie agricole régionale », Ministère de l’éducation nationale. Comité des travaux historiques et scientifiques, Actes du 93e congrès national des sociétés savantes, Tours, 1968, pp. 283-285 (cote : BROCH 2203) 

- Jacques Thoreau, L’évolution du droit de chasse en France. La capitainerie de Chambord, tapuscrit, 1978, 17 p. (cote : CR 1206) 

- Paul de Brantes, « Des châteaux et des chevaux », Revue des Vieilles Maisons Françaises, n° 165, décembre 1996 (cote : 592 PER 1996) 

- Jean-Paul Grossin, À propos de la chasse en Sologne… Dossier visiteurs, Blois, Maison du Loir-et-Cher, exposition présentée du 15 novembre au 15 décembre 2002, 7 p. (cote : GN 510) 

- Cercle des cartophiles du Loiret, La vénerie est en région Centre, Bulletin Hors-série n° 16, décembre 2003, 120 p. (cote : GL 500) 

- Alain Philippe, Chasse : le bonheur est en Sologne, Romorantin-Lanthenay, Éditions CPE, 2006, 256 p. (cote : GL 424) 

- Dossier « Regards sur la Sologne », Revue des Vieilles Maisons Françaises, n° 219, octobre 2007 (cote : CR 1365)